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Interview de Raphaël Yharrassarry – psychologue, ergonome

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Pour changer un peu, et peut être parce que je n’ai pas assez de temps pour faire plus d’articles, je change un peu d’exercice pour présenter une première interview, celle de Raphaël Yharrassarry que j’ai eu le plaisir de rencontrer à une réunion du UX Book Club parisien (prochaine évolution, un podcast ou une video ?)

– Bonjour Raphaël, peux-tu te présenter rapidement ?
Raphaël Yharrassarry, 38 ans. Je travaille en Freelance depuis 12 ans environ dans le domaine de l’ergonomie des IHM. J’ai donc réalisé de nombreuses missions de conseils, de conceptions et d’évaluations sur des sujets variés allant des applications professionnelles aux services grand public sur la télévision en passant par le Web et les tablettes.

– Quelles études as tu fais ?
J’ai une formation initiale en psychologie sociale et cognitive, un DESS d’ergonomie à Paris 5. J’ai aussi fait mastère Marketing et Distribution au CNAM en 2008, pour mieux comprendre les problématiques liées à la vente, à la gestion de la relation avec les clients. En dehors des études, je suis autodidacte tous les aspects liés à l’informatique. En effet, j’ai eu la chance de grandir avec l’informatique. Mon père avait ramené à la maison un Mac. J’ai rapidement compris l’avantage que l’on pouvait en tirer en termes de productivité.

– Te considères-tu comme un ergonome ? Un designer ? Un spécialiste UX ?
La dure question du titre ! Sur ma carte de visite, il y a marqué « psychologue, ergonome ». « Psychologue » car c’est un titre protégé, il faut un bac +5 en psychologie pour pouvoir l’utiliser ce qui est mon cas. Ça évite les confusions sur le niveau de formation. « Ergonome » car toute mon activité est basée sur une connaissance la plus fine possible des usages et des utilisateurs. Designer, pas vraiment car je n’ai pas une formation de design « industriel », et je ne vais pas « dessiner » un service, je vais le concevoir de manière très scientifique, un peu froide. « UX » c’est le terme à la mode actuellement. Je l’utilise effectivement, le problème c’est que c’est un titre « fourre-tout » recouvrant bien des compétences et des incompétences.

– D’où vient cette passion ? Pourquoi avoir choisi cette voie ?
Au début de mes études, je pensais travailler dans les ressources humaines. Puis en maîtrise j’ai eu un cours sur l’ergonomie de M. Spérandio. Là, j’ai rapidement compris que c’est cela que je voulais faire, de la conception avec une préoccupation constante pour les utilisateurs et la nécessité d’avoir des connaissances approfondies en facteur humain.

– A quoi correspond ton métier de tous les jours ? Pourrais-tu décrire rapidement la journée d’un ergonome ?
Fais-tu beaucoup de prototypage ? Si oui quels outils utilises-tu ?
Il n’y a pas vraiment de journée type, surtout en Freelance ! Donc oui, je fais beaucoup de prototypage, soit directement en HTML/CSS avec Dreamweaver, soit avec Balsamiq pour un premier brouillon. Le papier/crayon reste une valeur sûre pour échanger autour d’une table. J’utilise Illustrator pour faire des interfaces sur la TV, car les logiciels classiques (Axure, Balsamiq,…) ne proposent pas de gabarit pour la TV.

– As-tu un processus ou une méthodologie précise ?
Oui, mais c’est un peu compliqué à expliquer en deux lignes. Ce qu’il faut retenir, je pars du plus large pour arriver au plus précis. En quelques étapes :
– Analyse de l’activité, connaissance des usages, des utilisateurs
– Modélisation du service : quels sont les objets manipulés ? Quelles actions sur ces objets ?
– Application du Guidelines de la plateforme : iOS, Windows, Web, etc. Et quand il n’y en pas comme sur la Tv, il faut le créer.
– Structure du service : Menu, Ecrans principaux, Dialogue, …
– Spécifications détaillées.

Je te renvoie à cet article sur mon blog pour plus détails : http://blocnotes.iergo.fr/concevoir/concevoir-une-application-wimp-le-processus/

Ça, c’est la méthodologie, différents outils interviennent suivant les besoins, le temps ou les contraintes (Test utilisateurs, Personnas, expérimentation, audit, maquette, etc.)

– Quelles sont les principales difficultés que tu rencontres dans ton métier ?
Le management des entreprises est généralement issu des écoles de commerce ou d’ingénieurs. Le facteur humain, les IHM, l’expérience utilisateurs sont des domaines qui leur sont complètement inconnus. Il y a donc rarement une volonté profonde de mettre l’utilisateur au centre de la conception. Il suffit de regarder l’organisation des entreprises, combien d’entre elles ont une direction « UX, Design, Facteur humain » ? La montée en puissance d’Apple depuis 10 ans, commence à faire évoluer les choses, mais c’est long, très long.

– As-tu des conseils à partager pour les ergonomes actuels ou futurs ?

Des conseils ? Personnellement, je tiens beaucoup à l’aspect logique, scientifique de la conception d’IHM et aux méthodes liées facteurs humains. Ça permet de tenir le cap pendant que les modes passent. Aujourd’hui on parle d’UX, hier d’architecture de l’information, demain sans doute d’autres choses, mais les théories de la Gestalt seront toujours vraies !

– Comment évolue le métier d’ergonome ? Comment vois-tu ton métier dans 10 ans ?
Les deux questions vont ensemble. Depuis 10 ans, le niveau des demandes c’est peu à peu élevé, passant de « la couleur de la moquette » à des problématiques réelles d’ergonomie. La demande a souvent pour origine les utilisateurs eux-mêmes qui se rendent compte que l’on peut faire mieux ! Pour les 10 ans avenirs, j’aurai du mal à faire des prédictions, mais il me semble que cette progression va continuer. Ça implique aussi des changements en termes de marché de l’ergonomie et de l’expérience utilisateur qui passe d’un marché de niche à un marché plus large.

– As-tu des livres, sites ou blogs à conseiller ?
Blog :

http://www.interaction-design.org/ Des articles de références.
http://www.measuringusability.com/ Beaucoup d’articles sur la validité des questionnaires, tests utilisateurs et les statistiques
http://www.gargarismes-ergonomiques.com quelques ressources intéressantes.

Livres :
Card sorting de Gautier Barrère et Éric Mazzone qui est sorti récemment :
http://www.editions-eyrolles.com/Livre/9782212134483/card-sorting
Search Analytics for Your Site, Louis Rosenfeld
http://rosenfeldmedia.com/books/searchanalytics/

 

Modèle mental d'un système

Le modèle mental

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Les gens comprennent et interagissent avec les systèmes et l’environnement par l’intermédiaire de représentations mentales développées par l’expérience. Si le résultat de l’interaction correspond à celui du modèle mental, ce dernier est exact et complet. Sinon il est considéré comme inexact et incomplet. Il y a deux types de modèle mental basique : les modèles mentaux du comment le système fonctionne (modèle du système) et ceux du comment les gens interagissent avec les systèmes (modèle d’interaction).

Modèle mental d'un système

Les designers ont généralement un modèle du système complet et précis mais un modèle d’interaction faible. Ils savent très bien comme le système fonctionne mais ont peu d’information sur comment les utilisateurs vont se servir du système. A l’inverse, les utilisateurs ont tendance à avoir une vision imprécise du fonctionnement du système mais, à travers l’expérience, ils créent des modèles d’interaction bien plus précis que ceux des designers. Le design optimal n’apparait que quand les designers ont une vision précise et complète du modèle du système et d’interaction et proposent une interface qui reflète une fusion efficace des deux modèles.
Le designer peut obtenir un modèle d’interaction précis et complet à travers une utilisation personnelle du système, des tests en laboratoire (groupe de travail et tests d’utilisabilité) et une observation directe des personnes utilisant le système ou un système proche.

Il faut effectuer un design qui prend en compte le modèle d’interaction des utilisateurs. S’il existe un modèle mental standard du fonctionnement de quelque chose, il faut essayer de le mettre à profit. Quand ce n’est pas possible, il faut créer une expérience d’interaction qui prend source dans des modèles mentaux communs autant que possible, par exemple la métaphore du bureau sur les ordinateurs. Cependant il ne faut pas non plus limiter le design : il est parfois préférable que les gens aient à apprendre un nouveau modèle mental clair et consistant que d’utiliser un modèle mental familier qui ne convient pas.

Universal Principal of Design donne un exemple concret avec l’ABS sur les systèmes de freins de voiture. L’ABS nécessite une utilisation très différente d’un système de freinage plus classique sur surface glissante. Sans ABS, il faut mieux « pomper » sur les freins pour éviter le blocage des roues et ainsi garder le contrôle de la direction. Les bruits et les vibrations sont mauvais signes. Au contraire, avec l’ABS, il ne faut pas hésiter à appuyer fort sur l’ABS tout en contrôlant la direction du véhicule. Les bruits et les vibrations sont signes que le système fonctionne correctement. Le problème vient du fait que les conducteurs vont avoir tendance à utiliser le modèle mental du système sans ABS à l’ABS qui devient alors inutile et même augmente les probabilités d’accident.

Texte traduit provenant de Universal Principles of Design

Mapping contrôle - vitre électrique

Mapping

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Le mapping correspond à la relation entre les contrôles et ses mouvements ou ses effets. Les bons mappings entre les contrôles et leurs effets permettent de faciliter l’utilisation. On parle aussi de relation entre contrôle et affichage ou de compatibilité stimulus-réponse.

Tourner une roue, enclencher un commutateur ou appuyer sur un bouton et vous attendez certains effets. Quand l’effet correspond au résultat souhaité, le mapping est considéré comme bon ou naturel, autrement il est considéré comme pauvre. Par exemple, le contrôle d’une vitre électrique dans la portière d’une voiture peut être orienté afin que le fait de baisser ou lever la vitre soit évident. Mettez ce contrôle dans l’accoudoir et donnez lui une orientation avant-arrière et la relation entre le contrôle et le fait de lever-baisser la vitre n’est plus du tout évident.

Mapping contrôle - vitre électrique

Les contrôles de cette vitre électrique donnent de très mauvaises indications sur leur mapping

Un bon mapping est principalement fonction d’une similarité de disposition, comportement ou signification. Quand la disposition des contrôles d’une cuisinière correspond à la disposition des plaques de cuisson, on a alors une similarité de disposition. Quand tourner le volant à gauche, fait tourner la voiture à gauche, on parle de similitude de comportement. Quand un bouton d’arrêt est coloré en rouge, on parle de similarité de signification. Dans chaque cas, la similarité rend la relation contrôle-effet prévisible et ainsi plus facile à utiliser.

Il faut positionner les contrôles afin que leur disposition et leur comportement correspondent à la disposition et au comportement du dispositif. Il faut éviter d’utiliser un seul contrôle pour plusieurs fonctions. Si ce n’est pas possible, le mieux est d’utiliser des modes visuels distincts pour indiquer la fonction activée. Il faut faire attention aux conventions car différents groupes de population peuvent interpréter la convention différemment (par exemple en Angleterre, enclencher un interrupteur de lumière vers le haut éteint cette lumière).

Texte traduit provenant de Universal Principles of Design

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